Cotation d'une obligation : un vrai casse-tête ! et investissement

Les obligations étaient le placement préféré des Français jusqu'en 1970. Depuis, ils ont peu à peu délaissé ce produit, jugé trop technique, pour d'autres, plus accessibles. Car l'obligation, malgré son principe simple -un prêt de capital en échange d'un loyer- est un placement très sophistiqués et qui demande un minimum de connaissances avant d'être abordé.

Toute personne qui a essayé de déchiffrer la cote des obligations telle qu'elle apparaît sur un site ou un journal financier, sait qu'elle se prépare à un vrai casse-tête. En effet, elle verra apparaître différents chiffres mais aucun ne correspondra au prix auquel elle pourra la vendre ou l'acheter. Pourquoi ? Parce que les obligations sont cotées en pourcentage de la somme inscrite à la créance (cette somme est aussi appelée le « nominal »).

Mais ce n'est qu'un des éléments à prendre en compte pour parvenir au cours véritable. Prenons notre calculette et livrons-nous au petit calcul nécessaire à la détermination du cours d'une obligation, à partir des éléments publiés par la cote du quotidien La Tribune.

L'obligation qui servira à notre calcul est une des plus liquides et des plus connues du grand public : c'est l'obligation Charbonnages de France. Voyons les huit colonnes publiées à la ligne Charbonnage de France.

1) Charbonnages de France

2) Valeur : 5% 03/98-04/2013 (CB)

3) Code : FR0000572349

4) Nom. : 1

5) Dernier : 99,4

6) C/C : 3,552

7) Tx Act.: 5,4717

8) Amort.: 25-04-13

Maintenant, décryptons ensemble les différentes colonnes de lecture. Du moins celles qui suivent la première colonne, qui n'est qu'un simple rappel du nom de l'obligation.

1) La colonne « Valeur » : elle indique le rendement auquel a été émise l'obligation, sa date de création et sa date de remboursement. Une date qui, ici, se rapproche d'ailleurs rapidement...

2) La colonne « Code » : il s'agit du code ISIN (International Securities Indentification Numbers), le système de notation unifié commun à toutes les valeurs échangeables, et qui comprend dix chiffres précédés de deux lettres, en fonction de la place de cotation. Les lettres pour Paris sont : FR.

3) La colonne « Nom. » : Elle indique de combien de titres dont il faut disposer pour pouvoir être remboursé au nominal.

4) La colonne « Dernier » : Le voila enfin : c'est le cours ! Mais attention, comme pour toute obligation, celui-ci est exprimé en pourcentage du nominal. Le cours, ce jour-là est donc inférieur au prix nominal du titre ou à la somme qui sera remboursée à l'échéance. C'est un cours hors coupon. Tout vendeur de ce titre en cours d'année, entre deux versement de coupon, a aussi droit à une part de celui-ci, qui correspond à la durée pendant l'obligation lui a appartenu : c'est sa quote-part du coupon déjà couru. Celle-ci est indiquée dans la colonne suivant, intitulée C/C.

5) La colonne « C/C » : Ces deux lettres signifient « coupon couru ». Et indiquent la part du coupon acquis par le titre depuis le dernier versement. Pour obtenir le cours de l'obligation, l'investisseur doit donc se livrer à une petite opération et additionner les deux pourcentages puis les multiplier par le nominal. Pour calculer le cours réel, il faut donc de multiplier le nominal (1000 euros, par exemple) par le résultat de l'addition. Ce qui donne 1000 x (99% + 3,552%) = 1000 x 102,552%= 1025,5 euros. Ouf ! Nous y voilà : nous avons enfin le cours...

A quoi réagit le cours d'une obligation ?

On peut se demander pourquoi le cours d'une obligation devrait varier puisque tout est connu d'avance : son souscripteur est assuré (ou presque) de toucher le capital et de recevoir, chaque année, un revenu (le coupon) fixé à l'avance. Pourtant, les obligations sont des produits très sensibles. La principale variable qui influe sur leur cours, ce sont les taux d'intérêt des marchés financiers. Elle est mesurée par la sensibilité. Une sensibilité de 0,78% signifie qu'en cas de variation de 1 point du taux du marché, le cours de cette obligation montera ou descendra de 0,78%.

En cas de récession économique, par exemple, les emprunteurs, compte tenu des risques plus élevés de faillites, devront payer davantage pour trouver des capitaux. Les taux d'intérêt pratiqués sur le marché vont alors augmenter  et ceux qui voudront émettre des obligations devront consentir un rendement plus élevé.

Que deviennent les anciennes obligations, qui sont cotées en bourse ? Ceux qui en détiennent seront tentés de les revendre pour aller acheter ces obligations nouvelles qui rapportent davantage. Du coup, que fait le cours ? Il baisse. Il baissera aussi si un élément particulier affecte la vie de l'entreprise. Elle est proche de la cessation de paiement ? Les investisseurs vendront en masse et le cours baissera.

Dans les deux cas, ce cours baissera jusqu'à ce que son rendement réel (constitué d'un coupon fixé à l'avance, et d'un cours, évolutif) corresponde à celui des obligations nouvellement émises, si la situation de l'entreprise est « normale » ou qu'il corresponde à un rendement à la hauteur des risques pris par l'investisseur, dans le cas d'une entreprise qui est dans une situation « délicate ». C'est ce qui se passe aussi pour les obligations souveraines, celles des pays périphériques de la zone euro, comme la Grèce : leurs cours ont baissé jusqu'à ce qu'elles affichent des taux de rendement en rapport avec ce que pense le marché de leur situation économique. Ils sont ainsi montés, toujours pour le cas de la Grèce, à plus de 16% !

Pour mieux comprendre ce processus, prenons le cas d'une obligation de 1000 euros qui rapporterait 5% par an, soit 50 euros. Si l'entreprise qui l'a émise est contrainte de lancer de nouvelles émissions d'obligations au taux de 6%, le cours de la première va baisser en bourse. Et, compte tenu du fait que le coupon de 50 euros est, lui, fixé une bonne fois pour toutes, ce cours va baisser jusqu'à ce que ces 50 euros versés chaque année représentent l'équivalent de 6% de rendement : l'équivalent de ce que promettent les dernières émissions de l'entreprise.

Bien sur, cette situation, qui ne concerne que les obligations à taux fixe, fonctionne aussi, mais à l'inverse, en cas de baisse des taux d'intérêt, ou d'amélioration de la situation de l'entreprise.  On le voit, les investisseurs qui pensent qu'une obligation est un titre sans risque se trompent. C'est sans doute vrai pour celui qui l'achète à l'émission et la conserve jusqu'à son remboursement. Mais tous les autres investisseurs peuvent être amenés à revendre leur titre en cours de route et dans ce cas, l'obligation peut faire perdre (quand les taux du marché remontent) ou gagner (quand ils baissent) beaucoup d'argent. 

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Arnaud Jeulin Responsable de la publication, Trader

Après un diplôme d'ingénieur, Arnaud a commencé une carrière de développeur. Il a travaillé avec des traders et des services de back office pour mettre en place des prototypes et des outils de trading. Il a ensuite créé sa propre entreprise en 2003.

Il a été responsable du webmarketing pour la Banque en ligne Suisse Synthesis, depuis rachetée par Saxo Bank. Il a aussi fait des audits pour différents brokers et participé à plusieurs salons professionnels pour les courtiers à Londres, Paris et Chypre.

Depuis 21 ans Arnaud a approfondi sa connaissance des brokers et des marchés, il utilise son expérience pour améliorer Mataf afin d'éviter d'orienter les visiteurs vers des brokers malhonnêtes ou des stratégies de trading dangeureuses.

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